Être télésecrétaire à la campagne
Publié le lundi 15 septembre 2014 par Celine Lieffroy, Séverine Derrien | 1 commentaires
Classé dans : Témoignages - Campagne -

Le télésecrétariat fait partie des activités qui peuvent être exercées à la campagne, mais cela ne va pas sans quelques inconvénients liés notamment à l’isolement.

Les motivations pour s’installer à la campagne sont la vie au vert et au calme, notamment quand on a des enfants : les grands espaces.

Les inconvénients : mieux vaut pouvoir s’assurer une clientèle à distance, car les trajets en voiture deviennent vite pénibles tandis que les entreprises locales ne sont pas forcément ouvertes à l’externalisation.

L’accès au réseau internet reste l’une des conditions indispensables pour s’installer en milieu rural.

Mieux vaut également faire l’effort de s’insérer dans le milieu local, car il n’est pas toujours facile de se faire connaître ni même de se faire accepter quand on vient de la ville.

Pour illustrer cette thématique, voici le témoignage de 5 télésecrétaires qui exercent en milieu rural.

Séverine Derrien est secrétaire juridique à distance dans le Gard (30)

Installée à Cannes-et-Clairan dans le Gard (30), une petite commune de 514 habitants entre Nîmes, Montpellier et Alès, elle a créé Smart Secrétariat en 2006 (voir son témoignage).

Avant, elle vivait à Saint-Quentin-en-Yvelines en région parisienne, regroupant près de 150 000 habitants.

Ses clients sont essentiellement des avocats pour lesquels elle s’occupe notamment de la transcription audio de leurs courriers et actes, de la facturation, des relances clients, de l’établissement d’actes et d’état de frais.

Séverine travaille exclusivement à distance.

« J’ai tenté de travailler sur site, mais ce fut un échec : impossible de gérer sereinement tous mes clients quand j’étais absente et perte de temps dans les transports. »

En s’installant à la campagne, elle souhaitait « avoir une maison, et offrir à (ses) enfants le calme et l’espace. » Elle ajoute : « C’est tellement plus agréable de se lever le matin et de voir les arbres, les fleurs, les animaux… »

Pour Séverine, les inconvénients sont surtout liés au réseau, car les problèmes sont plus nombreux qu’en ville où on a par ailleurs accès au WiFi, ce qui n’est pas le cas à la campagne.

« Mais avec une bonne organisation, ce problème peut être facilement résolu : clé 3G ou utilisation du téléphone portable pour palier les coupures internet. »

Pas de problème de solitude et d’isolement pour Séverine qui travaille d’ailleurs en partenariat avec des consœurs (voir son article dans l’eMag n°2).
Elle est aussi entourée par sa famille, ainsi que par d’autres travailleurs indépendants qui sont devenus des amis.

« Je suis dans un village animé. Mon mari est là la journée. Je récupère mes enfants tôt le soir et parfois le midi. Je vois mes amis à l’école ou au bus des enfants. Mes amis sont comme moi pour la plupart, travailleurs indépendants et certains ne travaillent pas. »

Ses conseils pour s’installer à la campagne :

  • S’assurer d’avoir une ligne internet correcte
  • Pouvoir absolument tout gérer à distance, car les trajets sont vite pénibles
  • Prévoir un plan B, car « à la campagne tout peut vite devenir compliqué si on tombe en panne d’un matériel ».

Séverine Midey est secrétaire indépendante en Eure-et-Loir (28)

Installée dans un hameau de la commune de Chuisnes (992 habitants), près de Chartes, elle a créé SED Gestion en 2013.

Originaire de la région parisienne, elle a donc dû apprendre « à faire 5 km pour aller chercher (sa) baguette ! ».

Ses prestations s’orientent vers la permanence téléphonique et la retranscription audio. Ses clients sont exclusivement des professions libérales.
Séverine travaille à 95 % à distance, mais accepte les remplacements sur site pour ses très bons clients.

« Je ne travaille quasiment pas sur site, car il me faut au minimum 30 minutes pour rejoindre la civilisation (et un client). Cela me fait perdre trop de temps par rapport à mes objectifs de conditions de vie avec mes enfants. »

Il a fallu aussi que son opérateur téléphonique lui confirme que sa connexion était suffisante pour assurer des prestations de permanence téléphonique.

À la question « Pourquoi s’est-elle installée à la campagne ? », elle répond « Parce que je suis tombée amoureuse d’un agriculteur ! », avant d’ajouter : « J’ai toujours été attirée par la campagne et les grands espaces depuis enfant. »

Pour elle, l’avantage de travailler à la campagne est aussi son inconvénient : « le bouche-à-oreille fonctionne très bien à la campagne, mais c’est à double tranchant ».

Parmi les avantages, elle y voit moins de concurrence, mais note aussi que les gens ont moins recours à l’externalisation qu’en ville.

« Il est difficile de se faire connaitre et reconnaitre quand on arrive de la ville. Il faut se montrer, participer à la vie locale. »

Séverine cherche à lutter contre la solitude du télétravailleur à la campagne :

« Je suis toujours en relation avec des collègues et des clients. Je souhaite aussi intégrer un réseau local de femmes entrepreneuses. La solitude de la campagne, je m’y suis habituée, elle ne me pèse plus. »

Son conseil :

« Il faut réfléchir à son projet avec toutes les cartes en main, mais rien n’est impossible ! »

Nathalie Maho est en projet pour devenir secrétaire indépendante en Corrèze (19)

Nathalie a quitté la région parisienne en août 2013 pour Juillac, village de 1 000 habitants en Corrèze, où son mari a créé une épicerie multiservices.

Elle-même a le projet de créer une activité d’assistante indépendante avec comme cible principale les artisans, commerçants et les TPE.

« Je souhaite travailler à distance, mais ne refuserai pas les missions sur site, si le nombre d’heures justifie le déplacement. »

Nathalie a vécu à la campagne plus jeune. Bien qu’elle ait tout fait alors pour se rapprocher de la ville, elle souhaite aujourd’hui « prendre le temps de vivre et profiter de la nature ».

« En fait, en ville on passe beaucoup de temps dans les bouchons. On court sans arrêt et on ne profite pas assez du temps et des gens. Les gens ne se parlent pas, pas de bonjour quand on se croise. Je trouve que la ville manque de chaleur humaine. »

Comme son mari, Nathalie a été accompagnée par Airelle Limousin, une association dont l’objectif est de soutenir et d’accompagner les porteurs de projet dans leurs démarches.
Elle doit encore les rencontrer pour faire un point sur son projet.

Son but est de ne pas rester seule et pour cela elle envisage d’intégrer une coopérative d’activités, et s’est inscrite à la prochaine réunion d’information de la Scop OXALIS.

Pour elle, le principal inconvénient de la campagne est la distance qui la sépare de ses clients potentiels, mais « en télétravail, pour le moment, (elle) ne voit pas d’inconvénient ».

Ses conseils :

« Pour celles et ceux qui veulent se lancer, je pense que les conseils sont les mêmes que ce soit à la campagne ou en ville. Il faut bien préparer son projet, bien y réfléchir et ne pas se lancer tête baissée sans un minimum de préparation. Pour cela, il faut discuter au sein d’un forum avec d’autres personnes en création ou ayant créé, ne pas hésiter à se faire accompagner par une association, la CCI ou la CMA. Pour ma part, j’ai trouvé que le Pack installation était un excellent guide pour envisager son projet dans sa globalité. Les conseils qu’on peut y trouver sont très pertinents et très utiles. C’est un investissement pour mon projet que je ne regrette pas. »

Claire ANDRADE est assistante indépendante dans le Loir-et-Cher (41)

Installée depuis 5 ans à Ouzouer-le-Marché, une commune agricole de quasi 2 000 habitants entre Orléans et Blois, Claire vivait auparavant dans l’agglomération orléanaise. Elle compte d’ailleurs déménager très prochainement pour revenir en ville.

Elle a créé son activité d’assistante indépendante, CA Burogestion, en 2012, d’abord au sein d’une couveuse d’entreprises puis comme auto-entrepreneur.

Ses clients sont des petites entreprises et des professions libérales.

« Je les assiste dans leur gestion quotidienne administrative et comptable, et je les aide à développer leur activité et faire connaître leurs produits et services auprès de leurs prospects par des actions de téléprospection. »

Elle travaille principalement sur site, chez ses clients.

Son installation à la campagne n’a pas vraiment été un choix de vie, mais a été motivée par le coût de l’immobilier en ville.

« Nous souhaitions être propriétaires de notre logement. Étant donné les prix élevés de l’immobilier en agglomération, nous avons acheté notre maison à la campagne. J’étais alors salariée en CDI dans une entreprise depuis plus d’un an sur Orléans. Au bout d’un moment, j’ai été découragée par le fait de parcourir 70 km par jour pour aller travailler. C’est après la naissance de mon deuxième enfant que je me suis intéressée au télétravail. »

Claire a choisi de se faire accompagner par la couveuse d’Orléans.

« Les organismes d’aide à la création d’entreprises se trouvent en ville et pas dans les campagnes. J’ai fait beaucoup de kilomètres pendant un an pour me rendre à ma couveuse d’entreprises. »

Une fois lancée, elle a dû aussi démarcher ses clients en ville…

« Je suis dans un village agricole où il y a peu d’entreprises. J’ai commencé par démarcher les entreprises locales sans obtenir de retours positifs. C’est finalement grâce au réseautage et à ma présence sur internet que j’ai pu gagner des clients…, mais en ville, sur Orléans ! »

Si elle apprécie de travailler au calme, sans stress lié au bruit extérieur, Claire et son compagnon souhaitent aujourd’hui rejoindre la ville.

« L’inconvénient, c’est que je parcours beaucoup de kilomètres quand je travaille sur site, car mes clients sont situés en ville, au minimum à 30 km de mon domicile. »

La ville serait aussi plus sources d’opportunités professionnelles que ce soit pour le travail ou les enfants.

« Nous souhaitons donner à nos enfants toutes les chances de réussite pour l’avenir et les écoles sont beaucoup plus nombreuses en ville. Pour ma part, comme quasiment tous mes clients sont en ville, le fait d’être plus proches d’eux me permettra d’être plus flexible et disponible pour eux. Actuellement, mon activité fonctionne très bien, mais je préfère anticiper au cas où celle-ci baissera un jour, je devrais peut-être retourner au salariat et les opportunités de postes seront plus nombreuses en ville qu’à la campagne. »

Un retour à la ville permettra aussi à Claire de rencontrer plus facilement d’autres entrepreneurs.

« Je souhaite rencontrer des entrepreneurs qui exercent la même activité que moi sur l’agglomération orléanaise pour faire connaître nos prestations aux petites entreprises qui ont des besoins. Je serai également plus disponible pour participer à des rencontres entre entrepreneurs et des salons, puisque ces manifestations sont plus nombreuses en ville qu’à la campagne. »

Malgré tout, Claire ne regrette rien : « vivre à la campagne m’a permis quelque part de connaître l’entrepreneuriat et de m’y épanouir professionnellement.  »

Katuscia Cliquot est assistante indépendante dans l’Aisne (02)

Installée à Montigny-sur-Crécy, petite commune de 400 habitants située à 20 km de la ville la plus proche, Katuscia a créé K. Assistance Conseil en 2013.

Auparavant, elle vivait dans une ville de 30 000 habitants.

Katuscia accompagne les entreprises et les associations dans l’optimisation de leur organisation, ainsi que les particuliers pour leurs démarches liées à l’emploi.

« J’ai beaucoup travaillé à distance au démarrage de mon activité, mais rapidement les interventions sur site sont devenues prégnantes. Les formations à distance se développent, mais elles sont encore peu recherchées. La coordination des projets associatifs peut se faire à distance (sauf dans le cas de coordination de travaux et de négociation avec les tarificateurs), mais les rencontres sont incontournables dans ce secteur, qui privilégie le lien humain. »

Elle s’est installée à la campagne notamment pour une question de confort.

Le fait de travailler essentiellement sur site lui permet de conserver de nombreux liens sociaux.

« Être indépendant ne signifie pas être isolé, que ce soit à la campagne ou à la ville. Rencontrer d’autres indépendants, aller à la rencontre de ses clients, participer à des repas de réseautage permet de rompre cet isolement. »

Katuscia assiste notamment à des petits déjeuners « ressources humaines » et à des rencontres trimestrielles organisées pour les entrepreneurs de son département.

Pour elle, les inconvénients du travail à la campagne sont :

  • La voiture qui est indispensable pour rencontrer ses clients ou participer à des réseaux ;
  • Les problèmes techniques liés au raccordement d’internet (coupures fréquentes et débit plus faible) ;
  • Les clients locaux sont souvent des artisans qui, faute de moyens, externalisent peu ;
  • Il est parfois difficile de faire accepter le télétravail.

Ses conseils :

« Pour travailler à la campagne, je pense qu’il est essentiel de cibler sa clientèle et de savoir comment on souhaite travailler (à distance ? systèmes d’informations utilisés ?) afin d’éviter une incompatibilité entre souhait et possibilité. »

Vous aussi vous exercez votre activité de télésecrétaire à la campagne…
Pensez à nous laisser votre témoignage en commentaire !

Crédits photo : Nicolas Fleury

Commentaires
Le mardi 4 novembre 2014 à 09h41

Bonjour à toutes et à tous,

Je suis d’accord avec mes consœurs ;), je suis installée depuis Juillet 2012 à la campagne dans un village de 380 habitants...

J’ai trouvé des missions ponctuelles sur Toulouse pour combler mon agenda. Les TPE du coin n’ont pas encore cette culture "télétravail".

Bonne journée.

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